IA : Les 5 débats de l’Intelligence artificielle

IA : Les 5 débats de l’Intelligence artificielle

IA : Les 5 débats de l’Intelligence artificielle 600 300 Opinion Act

Le 28 mai 2017, Alphago, l’intelligence Artificielle (IA) de Google remporte sa troisième manche contre Kee Ji, le numéro 1 mondial de Jeu de Go. Une première mondiale qui illustre la véritable percée de l’intelligence artificielle depuis la mise au point du deep learning. Et pourtant, dès le lendemain Google annonce mettre son champion à la retraite et consacrer ses efforts à des travaux plus utiles pour l’humanité.

En effet, ce sont 20 à 30 milliards de dollars que les géants des technologies investissent pour faire avancer la recherche. Si l’effervescence scientifique ne fait aucun doute, si les premiers usages commencent à se concrétiser dans nos vies avec les assistants personnels, les questions restent néanmoins nombreuses et divisent nos élites. Petit tour d’horizon en 5 débats.

Débat philosophico-scientifique : qu’est-ce que l’intelligence ?

Une question pour le moins passionnelle est celle de savoir si l’on pourra un jour imiter, voire dépasser l’intelligence humaine. C’est le fameux point de singularité défendu par le controversé Ray Kurzweil : le point d’inflexion au-delà duquel les hommes seront dépassés par les robots, de sorte que le progrès ne sera alors généré que par des supra-intelligences.

Le directeur de l’ingénierie de Google situe ce point d’inflexion aux alentours de 2040-2050. Les scientifiques qui doutent de cet excès d’enthousiasme technologique critiquent la robustesse méthodologique du modèle d’explosion de l’intelligence. D’autres argumentent sur l’incapacité de toute IA à reproduire la spécificité de l’intelligence humaine : la créativité, la conscience de soi, l’émotion, la communication non verbale mais aussi la capacité d’adaptation ne sont pas imitables et feraient échouer les IA au célèbre test de Turing.

Le débat éthique : faut-il s’inquiéter du transhumanisme ?

La conviction des transhumanistes est qu’il faut passer d’une logique de réparation du corps humain à une logique d’amélioration de manière à éradiquer définitivement la maladie, voire le vieillissement. En 2014, Bill Gates, Elon Musk et Stephen Hawking se sont émus publiquement du fait que l’IA pouvait mener à la fin de l’humanité si la recherche n’était pas encadrée strictement.

En France, des personnalités comme Luc Ferry ou Laurent Alexandre s’inquiètent du risque de dérive éthique et brandissent la menace d’un meilleur des mondes à la Huxley. Le futurologue Joël de Rosnay se fait plus rassurant, préférant parler d’hyperhumanisme. Pour lui, l’homme au cerveau augmenté n’est rien d’autre que la continuité de ce que l’homme a fait pour son propre corps, à savoir l’assister dans les tâches fastidieuses de son quotidien.

Le débat économique : création ou destruction d’emplois ?

Robot avocat, journaliste, enquêteur, médecin, chauffeur… Toute tâche qui nécessite de traiter une grande masse d’informations à synthétiser, recouper pour identifier, calculer, déduire ou encore décider est inévitablement menacée de robotisation. Les dernières études estiment que 10% des emplois présentent un risque élevé (sur 90% de leurs tâches) de substitution par les intelligences artificielles. Mais l’impact à long terme est vu de manière plus ou moins optimiste par les économistes.

Pour Daniel Cohen ou encore Jéremy Rifkin, on peut s’attendre à très peu de création d’emplois car le substitut de valeur se fait dans le même secteur d’activité, celui des services, rognant ainsi les emplois intermédiaires de la classe moyenne. Nicolas Bouzou rappelle que, comme le furent l’invention de la vapeur ou de l’électricité, l’intelligence artificielle est une « general purpose technology » qui aura un impact sur l’ensemble de l’économie. Il estime donc que ce n’est qu’après plusieurs décennies seulement que l’on pourra juger des innovations secondaires créatrices d’emploi.

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Le débat juridique : faut-il une personnalité juridique à l’IA ?

Les partisans de la création d’une personnalité juridique font le parallèle avec la personnalité morale des entreprises, qui n’exclut pas celle des personnes physiques. Pour d’autres, faire payer les robots, c’est risquer de faire l’économie de l’enquête. Or la vraie question semble être aujourd’hui de s’assurer d’une possibilité de contrôle des intelligences artificielles.

Laurence Devillers édicte 11 commandements pour les robots comme par exemple la traçabilité des algorithmes (« tu pourras toujours m’expliquer tes comportements si je te le demande ») et leur contrôle (« tu seras régulièrement contrôlé pour évaluer ce que tu as appris »).

Le débat sociétal : que devient le travail dans un monde de robots ?

La fragmentation du travail intellectuel en tâches, déjà entamée par l’ubérisation via le modèle des plateformes, va s’accélérer avec la robotisation. Les experts s’accordent à dire que la logique de poste de travail où des salariés en CDI sont rémunérés en fonction du nombre d’heures accomplies n’a plus de sens dans ce monde post-révolutions numériques. Les métiers vont devoir tous évoluer pour apprendre à travailler avec l’IA, d’où un enjeu crucial de formation et d’accompagnement des salariés.

Jean-Gabriel Ganascia évoque une évolution du travail au sens initial « labor » vers la notion chère à Hannah Arendt de travail « œuvre », où l’homme va exercer toute sa puissance créatrice et émotionnelle. Identifier, reconnaître les différentes formes de contribution sociétale (accompagner un proche malade, être membre d’une association, prendre des nouvelles des enfants d’un client…) et les valoriser seront des sujets majeurs, malheureusement trop vite évacués par la solution politique d’un revenu universel.


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